Tribaliques by Henri Lopes

Tribaliques by Henri Lopes

Auteur:Henri Lopes [Lopes, Henri]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Presse Pocket (1971) ch
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


4 – ANCIEN COMBATTANT

Peu de temps après le coup d’État, je me suis rendu compte que les jeunes officiers nous faisaient cocus. Ils avaient certes trouvé les arguments pour nous décider à entrer dans la conjuration contre le Président Takana, et nous n’avons pas hésité à risquer notre tête en préparant le complot. Il est vrai que ce fut facile de me convaincre. Je n’avais pas demandé un centime. L’atmosphère était devenue irrespirable au bout de trois ans de règne de Takana… Bien que le gouvernement ait eu des représentants de toutes les régions et de toutes les ethnies du pays, en fait, c’est le ministre de l’intérieur et un conseil clandestin de la tribu qui donnaient quotidiennement au président des directives sur les principales décisions à prendre. Comme je suis d’une tribu qui a toujours commandé à celle de Takana, la rébellion devenait pour moi un devoir. C’est dans ma région, en effet, qu’on a choisi, depuis l’arrivée des Blancs, les miliciens pour lutter contre les têtes dures qui ne voulaient ni payer l’impôt ni faire les corvées qu’ordonnaient les commandants français. Et je suis fils et petit-fils de chef, moi. Nous avons été depuis l’enfance habitués à commander dans la famille. Tandis que ce Takana – puisse-t-il pourrir dans la prison où nous l’avons jeté – c’est un fils d’esclave. Je connais la famille qui l’a acheté et lui a ainsi permis d’apprendre à lire et à écrire. C’est cette mentalité d’homme des basses classes qui l’a poussé à vouloir jouir de tout. Chaque plaisir était nouveau pour lui. C’est un peu ce qui l’a perdu d’ailleurs. Par exemple, il aimait trop les femmes. Il voulait toutes les voir dans son lit. Qu’elles fussent célibataires ou mariées, peu lui importait. Il s’estimait un droit de cuissage sur les citoyennes les plus fraîches et les plus éclatantes. Un jour à un cocktail il fut littéralement charmé par une jeune beauté qu’il ne connaissait pas. Elle avait ce soir-là un grand boubou sénégalais blanc et semblait sortir des mains du plus fin créateur. Il demanda qu’on la lui présente. C’était la femme d’un jeune lieutenant qui venait de rentrer. Il a tout fait, tout mis en branle pour que la belle accepte ses caresses. Rien ne la fit céder. De colère il fit muter le mari, commandant d’une zone en brousse à 1 200 kilomètres de la capitale. Et finalement il découvrit un complot où le lieutenant aurait trempé. Il appela la dame à qui il renouvela ses offres en échange de la liberté de son mari. Elle le gifla, dit-on. De rage il promit la mort au lieutenant. Il n’eut pas le temps de passer à exécution. Nous avons fait notre coup.

On m’a d’abord nommé ministre de la Défense. Il fallait voir comme on m’applaudissait. J’avoue que j’aimais me trouver dans les cortèges entourés des motards. D’ailleurs tous ces jeunes, aussi bien au Conseil révolutionnaire de libération qu’au gouvernement, ils n’avaient pas le sens du maintien que j’ai de manière innée.



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